Deux étudiants en double cursus Architecte / Ingénieur primés au 13e Trophée Béton

Campus
Publié le 11 Mar. 2025
En janvier 2025, Valentin et Anthony Loiseau ont été les vainqueurs du Trophée Béton dans la catégorie Studio. Les deux frères, qui suivent chacun un double cursus Architecte / Ingénieur, ont réinterprété une usine construite par Le Corbusier à Saint-Dié-des-Vosges. Ils partagent avec nous leur parcours et leur expérience.

Centrale Lyon ENISE : Pouvez-vous nous éclairer sur vos parcours d’études respectifs ? 

Valentin : Je suis en 4e année d’un double cursus Architecte / Ingénieur entre l’Ecole d’Architecture de Saint-Etienne et Centrale Lyon ENISE. La 4e année correspond à un Master 1 en architecture et un niveau licence en ingénierie. A la fin de cette année, il me restera deux ans en ingénierie à Centrale Lyon ENISE. 

Anthony : Je suis également en 4e année d’un double cursus Architecte / Ingénieur mais entre l'École nationale supérieure d'architecture de Lyon et l’École nationale des travaux publics de l'État (ENTPE). Comme Valentin, d’ici 3 ans j’aurais mes deux diplômes. 

 

Centrale Lyon ENISE : Pourquoi ce double cursus ? Qu’est-ce que qui a motivé votre choix de formation ? 

Valentin : nous avons suivi une formation scientifique au lycée et nous voulions nous lancer dans une formation en architecture sans pour autant renoncer à l’apprentissage des math, de la science et de la physique. Ce double-cursus était donc une opportunité parfaite. La double compétence offre plus d’autonomie dans les projets grâce à une maîtrise de l’ingénierie. Cela fait sens dans la carrière d’architecte que nous voulons avoir.

Anthony : le double diplôme élargit aussi les possibilités d’emploi pour nous. Nous pourrons travailler dans différentes structures selon nos envies : agence d’architecte, maîtrise d’ouvrage, bureau d’études… 

On a pu tester notre capacité à collaborer et à s’organiser dans le travail. C’est aussi un concours qui nous a rapproché autour d’un architecte qu’on apprécie.

Centrale Lyon ENISE : Venons-en au Trophée Béton. Comment l’avez-vous découvert ? Pourquoi avez-vous eu envie de participer ? 

Anthony : Le Trophée Béton est un concours qui existe depuis 13 ans. Il est organisé en deux catégories. La première est destinée aux jeunes diplômés via leur Projet de Fin d’Etude (PFE). La catégorie « Studio », qui nous concerne, est destinée aux étudiants en cours de cursus. La vingtaine d’équipe inscrites devait choisir une œuvre béton du XXe ou XXIe siècle et proposer une réinterprétation. Le dossier devait être constitué d’un texte présentant notre vision et de plans, de coupes, de documents graphiques et éventuellement d’une maquette. 

Valentin : Nous avons tous les deux découvert le concours l’année dernière, en aidant chacun de notre côté des camarades qui participaient. Cette édition du Trophée Béton était l’occasion de nous tester ensemble et de faire vivre notre passion commune pour le béton. Ce concours a permis de nous rapprocher de ce matériau. 

Anthony : Ce concours était aussi une opportunité de travailler sur une œuvre du Corbusier, un architecte que nous apprécions beaucoup. Nous voulions révéler au public l’Usine Duval de Saint-Dié-des-Vosges. C’est le seul bâtiment industriel construit par Le Corbusier et il reste méconnu. 

Valentin : En effet, Le Corbusier est très connu pour ses unités d’habitation, notamment celle de Marseille construite à la même époque. L’usine est restée dans l’ombre. Pourtant, on retrouve des éléments communs entre les deux. 

 

Centrale Lyon ENISE : Vous avez donc travaillé sur l’Usine Duval à Saint-Dié-des-Vosges. Pourquoi ce choix ? Quel est votre regard sur cette usine ? 

Valentin : Comme nous l’avons dit, c’est une construction méconnue du Corbusier construite dans les années 1950. Et elle est aussi située dans les Vosges, une région dans laquelle nous avons des attaches. Mais surtout, lorsque nous l’avons visité pour la première fois, nous avons été marqués par les deux murs pignons en grés rose. Ils ceinturent l’usine et ancrent le bâtiment dans le paysage rosé. Car dans cette ville, cette pierre locale a été beaucoup utilisée. L’usine, bien que très moderne à cause de l’utilisation du béton, se fond dans le décor grâce à ces deux pignons. Elle s’intègre dans la mémoire et la physionomie de la ville. 

Anthony : Dans cette usine, il y a aussi une problématique liée aux conditions de travail que nous voulions retranscrire dans notre projet. Le Corbusier a pensé au bien-être des salariés et offert des conditions de travail exceptionnelles, notamment par le rapport au paysage et à la lumière. On voulait montrer l’intelligence et la fonctionnalité du lieu pour ceux qui y travaillent tous les jours, encore aujourd’hui. Ces choix étaient et sont en décalage avec les usines actuelles.

Valentin : Le Corbusier avait appelé cette usine, l’usine verte par opposition à une usine noire. Elle est étonnamment moderne et présente beaucoup de caractéristiques qu’on lierait aujourd’hui à des problématiques environnementales. Par exemple, tous les espaces sont éclairés par de la lumière naturelle. Elle est aussi développée dans la verticalité pour utiliser moins de surface au sol. Enfin, au rez-de-chaussée, il y avait dès l’origine un grand parc à vélos. Pour le Trophée Béton, nous voulions donc mettre en lumière une œuvre du passé qui a encore beaucoup de résonnance avec les problématiques actuelles. 

Anthony : J’ajoute un dernier sujet avant-gardiste imaginé par Le Corbusier : le réemploi de la pierre. Les murs en grés rose de l’usine sont montés avec des pierres issues des ruines de l’ancienne usine. Le réemploi est un sujet tellement actuel, c’en est étonnant. Le Corbusier a aussi utilisé la mixité des matériaux, aussi d’actualité. 

Centrale Lyon ENISE : Que vous a apporté cette expérience sur le plan personnel et professionnel ? 

Anthony : Sur le plan personnel, il s’agit de notre premier concours et de notre premier concours ensemble. On a pu tester notre capacité à collaborer et à s’organiser dans le travail. C’est aussi un concours qui nous a rapproché autour d’un architecte qu’on apprécie. 

Valentin : Sur le plan professionnel, réinterpréter est un exercice particulier que nous n’avions jamais eu l’occasion de faire. Au cours de nos études, les projets tournent autour de l’analyse ou de la conception. 

Anthony : Le Trophée Béton nous a également donné de la visibilité (publication dans une revue, ouverture vers des contacts…) et permis de bénéficier d’un accompagnement. Ce concours est vraiment authentique et s’investit beaucoup pour mettre en avant les travaux des étudiants.

 

Centrale Lyon ENISE : Valentin, comment la formation à Centrale Lyon ENISE t’a aidé dans ce projet ? 

Valentin : Dans l’analyse de l’usine, la double vision Architecte / Ingénieur a beaucoup servi. Les deux axes étaient entièrement mêlés. D’un côté, nous avons le squelette de l’usine en béton, un parfait exemple d’ingénierie. De l’autre nous avons les pignons sensibles et plastiques qui relèvent de l’architecture. Suivre une double formation, m’a permis de comprendre facilement les choses, par exemple le franchissement des portées en béton, les manières de couler le béton avec des planches de coffrage, l’armement du socle…

 

Centrale Lyon ENISE : En quoi ce concours vous a-t-il aidé à mieux comprendre votre futur métier ? 

Anthony : Dans notre démarche, nous avons voulu intégrer les deux visions. La vision de l’architecte, quelqu’un qui sait s’intégrer dans le paysage, l’histoire et la culture grâce aux matériaux, aux formes, aux proportions, aux couleurs… Et la vision de l’ingénieur qui maîtrise l’utilisation du béton et ses capacités, l’organisation des chantiers… Ce projet autour de l’usine Duval montre la complémentarité de l’architecte et de l’ingénieur. Et c’est ce que nous défendons dans notre futur métier. 

 

Centrale Lyon ENISE : Après cette belle réussite, quels sont vos projets ? D’autres concours ensemble ?

Valentin : Nous travaillons actuellement sur un autre concours avec M.PERRIN, enseignant à Centrale Lyon ENISE. Nous avons choisi de réhabiliter une librairie située à Bourg-en-Bresse. L’objectif, comme avec le Trophée Béton, est de travailler un matériau, ici l’acier. La différence se situe dans le fait que la réhabilitation de la librairie correspond à une vraie demande. C’est aussi un concours qui donne une plus grande place à l’ingénierie. Mais nous utiliserons évidemment nos connaissances en architecture. Le dossier sera remis avant l’été prochain.